Encore inconnue dans la région il y a quelques années, la besnoitiose bovine s’est répandue très rapidement dans les cheptels bovins des Alpes de Haute-Provence et des Hautes-Alpes. C’est une maladie parasitaire vectorielle due à Besnoitia besnoiti, parasite microscopique de la famille des coccidies. Bien qu’il n’existe aucun traitement efficace et qu’il soit illusoire d’éradiquer cette maladie, les observations et études réalisées ces dernières années nous donnent des pistes pour mieux gérer la maladie dans les troupeaux.

Bien connaître les symptômes de la besnoitiose pour réagir vite …

L’hyperthermie

Six à 10 jours après la contamination apparaît soudainement une très forte fièvre (40 à 42 °C) qui se maintient 3 à 10 jours. L’animal est essoufflé, il a le nez et les yeux qui coulent.
A ce stade la maladie peut-être confondue avec d’autres (bronchopneumonie, coryza gangréneux, photosensibilisation) et aucun test de laboratoire ne permet de confirmer le diagnostic.

Les oedèmes

Après disparition de la fièvre, des œdèmes apparaissent au niveau de la tête et des parties inférieures du bovin (pattes, fanons, testicules, mamelles). Dans les zones concernées la peau devient chaude et douloureuse, des crevasses peuvent se former aux plis des articulations et l’animal ne mange plus. Cette phase dure 1 à 2 semaines mais peut se prolonger jusqu’à 1 mois. Le diagnostic différentiel est encore délicat (ehrlichiose, photosensibilisation, FCO) et les tests de laboratoires ne réagissent pas encore.

La sclérodermie

Immédiatement après la disparition progressive des œdèmes ou quelques jours à quelques semaines plus tard, la peau s’épaissit, elle se plisse et se cartonne. C’est alors qu’on observe la « peau d’éléphant  » caractéristique de la besnoitiose bovine. Dans les cas les plus graves les bovins maigrissent, leur état général se dégrade entrainant la mort de l’animal. Les symptômes sont alors très caractéristiques et lors de l’apparition du 1er cas il est possible de réaliser un prélèvement de sang ou de peau pour confirmer le diagnostic.

Les porteurs de kystes

Un animal infesté reste porteur à vie du parasite , même s’il ne tombe pas malade au moment de la contamination, il n’est pas exclu qu’il développe les symptômes plus tard, à la suite d’une baisse d’immunité (vêlage, autre maladie, …).Environ 25% des animaux infestés par la besnoitiose, qu’ils aient ou non développé un des symptômes cliniques, sont porteurs de kystes visibles sur la sclère oculaire , au niveau du pli de la queue et de la vulve.

Traiter pour ralentir l’évolution clinique …

Il n’existe aucun traitement qui permette à l’animal d’éliminer l’ensemble des parasites.

Pendant les phases d’hyperthermie et d’œdèmes, un traitement à base de sulfamides permet de ralentir l’évolution de la maladie. En général il est alors possible de valoriser l’animal à l’abattoir. Le traitement inclut des antibiotiques, il faut donc faire attention au délai d’attente. Plus le traitement est précoce, plus il est efficace. Même si l’état de l’animal s’améliore, il devra être éliminé car il reste une source de contamination pour les autres animaux. Contactez votre vétérinaire pour mettre en place un traitement adapté.

En cas de doute, contactez votre vétérinaire.

De bovin à bovin par les insectes piqueurs …

Si les parasites proches de Besnoitia besnoiti ont 2 hôtes (un intermédiaire et un définitif), son hôte définitif n’est pas connu. Les suspicions portées sur le chat n’ont jamais été confirmées expérimentalement. Les contaminations observées sont donc liées à un transfert de parasites de bovin à bovin par des insectes piqueurs, taons et stomoxes essentiellement.

Lorsqu’un insecte piqueur est interrompu pendant son repas de sang sur un bovin infesté (coup de patte, de queue …), il peut finir son repas sur un bovin indemne situé à proximité et lui inoculer le parasite.

Plusieurs paramètres influencent la vitesse de diffusion de la maladie dans le troupeau :

  • Nombre d’animaux fortement infestés
  • Quantité d’insectes piqueurs
  • Proximité entre les animaux

Quelques dizaines de mètres entre bovins suffisent à réduire le risque de transmission. Pour limiter la contamination de votre troupeau il est recommandé d’isoler les animaux suspects ou confirmés porteurs du parasite.

Évolution de la maladie dans le troupeau …

La besnoitiose peut circuler 2 à 3 ans dans un cheptel avant que les premiers cas cliniques ne se déclenchent. Même en l’absence de cas clinique il peut y avoir des animaux
infestés dans le troupeau. Lors de l’introduction du parasite, les animaux les plus sensibles développent les symptômes cliniques, la maladie touche alors des animaux de tous âges. La mortalité peut alors atteindre 10%.

Après quelques mois, la situation parait s’améliorer mais le parasite continue à circuler. Si les animaux sont en bon état physiologique et possèdent une bonne immunité, un équilibre s’installe entre bovin et parasite. Lorsqu’un animal s’affaiblit, lors d’un vêlage ou du développement d’une autre maladie, l’équilibre est rompu, de nouveaux cas cliniques apparaissent alors chez des animaux jusqu’à présent résistants. Avec le temps, broutards et génisses sont les plus sensibles, les cas cliniques peuvent se multiplier sur ces jeunes animaux perturbant fortement le renouvellement.

Une maladie non réglementée …

La besnoitiose n’est pas une maladie réglementée et il n’y a aucune raison qu’elle le devienne hormis si la demande émane d’organisations agricoles avec un financement des mesures par les éleveurs. L’introduction récente de la maladie en Allemagne, en Suisse et en Italie en fait tout de même une préoccupation pour les pays acheteurs de bovins vivants.
Les mesures de surveillance, de prévention et de lutte sont donc à l’initiative de chacun mais elles peuvent être discutées dans un cadre collectif notamment dans les Groupements Pastoraux.

La besnoitiose n’est pas une maladie honteuse, n’hésitez pas en discuter avec vos voisins, vos cotranshumants…

Dans un troupeau atteint, on trouve des bovins :

  • Indemnes, séronégatifs : ils n’ont jamais été en contact avec le parasite.
  • Contacts : ils sont séropositifs mais, il est impossible de mettre en évidence le parasite dans leur organisme.
  • Porteurs asymptomatiques : ils sont séropositifs et portent une grande quantité de parasites dans des kystes visibles dans les yeux mais n’ont pas d’autres symptômes.
  • Malades : ils présentent des signes évidents de la maladie : leur peau d’épaissie et se cartonne progressivement.

La besnoitiose touche ou risque de toucher mon troupeau, que faire ? …

Évaluer le risque d’exposition

La besnoitiose étant une maladie vectorielle il est impossible de se protéger d’une contamination de « voisinage » mais des mesures de surveillance et de prévention peuvent réduire les risques liés aux achats et à la transhumance collective. Une analyse de risque peut vous permettre d’estimer l’exposition votre troupeau afin de mettre en place des mesures de surveillance et de prévention si nécessaire.

Identifier le premier cas

Si votre cheptel est exposé à un risque de besnoitiose, tout animal présentant une phase fébrile soudaine et intense est suspect. Contactez votre vétérinaire pour un examen approfondi. Sachant qu’aucun test de laboratoire ne permet de confirmer précocement la maladie, l’animal doit-être isolé, un traitement peut-être mis en œuvre si le vétérinaire le juge nécessaire. Un prélèvement de sang doit être réalisé au moins 6 semaines après l’apparition de la fièvre pour confirmer le diagnostic. S’il est confirmé atteint de besnoitiose, même si son état s’améliore, il doit être abattu car c’est un réservoir de parasites susceptible de diffuser la maladie dans le troupeau.

Faire un point de situation et surveiller

L’identification précoce des animaux malades et la recherche régulière des animaux porteurs de kystes permettent de prendre des mesures pour limiter l’impact et la diffusion de la maladie. Même malade un animal peut-être valorisé à l’abattoir.

Mettre en place une élimination sélective

Tous les animaux ne sont pas égaux devant la besnoitiose. Certains portent une quantité de parasites beaucoup plus importante que d’autres et ces animaux favorisent la contamination de leurs congénères. Animaux malades et porteurs de kystes sont faciles à identifier, ce sont ceux à éliminer en priorité. En complément, vous pouvez réaliser un dépistage sérologique pour éliminer animaux les plus fortement séropositifs. Un taureau malade de besnoitiose a de très grands risques d’être stérile, il est donc impératif d’éliminer les mâles reproducteurs malades.

Lutter contre les insectes piqueurs

La lutte contre les insectes est très complexe. L’utilisation régulière d’insecticides chimiques est couteuse, elle est dangereuse pour l’environnement et favorise l’apparition d’insectes résistants. Ce type de traitement doit être réservé aux animaux les plus exposés au risque de contamination. Éviter la présence d’eau stagnante, éloigner les tas de fumier des bâtiments d’élevage, ne pas stocker la paille et le foin directement sur de la terre … ces mesures peuvent permettre de réduire les populations d’insectes sur l’exploitation en supprimant les sites de ponte.

Gérer la transhumance

Des analyses sérologiques réalisées sur des animaux transhumants ont montré que la cohabitation sur une même estive de troupeaux fortement touchés et de troupeaux indemnes était possible. Bien qu’elle soit fréquente, la contamination en estive n’est pas systématique, la faible densité d’animaux peut expliquer ce phénomène. Il est donc important de prendre quelques précautions notamment de ne pas monter d’animaux malades ou porteurs de kystes. Pour les cheptels indemnes, un contrôle visuel des animaux au retour d’estive (kystes, œdèmes, croûtes sur la mamelle …) et une surveillance dans les semaines qui suivent permettent de détecter d’éventuelles contaminations.

Gérer les achats

Lors d’un achat, un examen visuel minutieux de l’animal pour rechercher les symptômes de besnoitiose est la précaution indispensable pour éviter d’introduire un animal très fortement infesté. Les performances de tests sérologiques ne permettent pas d’utiliser ces analyses en routine pour le contrôle des animaux introduits, toutefois un éleveur qui a réalisé un dépistage sérologique sur son troupeau et qui a éliminé l’ensemble des animaux positifs a tout intérêt à réaliser un contrôle sérologique à l’introduction.

Changer les aiguilles

Bien que la transmission du parasite par les aiguilles n’ait jamais été démontrée expérimentalement, dans les cheptels touchés par la besnoitiose il est fortement conseillé de changer d’aiguille entre chaque animal. C’est une mesure de précaution.

Si vous souhaitez faire des analyses, contactez votre vétérinaire, il vous conseillera au mieux.

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Méthodes d’analyses :

  • PCR : mise en évidence de la présence du parasite par amplification de son ADN (signature génétique). Elle permet la détection de parasites enkystés dans la peau. Sur le sang la détection est très aléatoire car les parasites circulent par vagues.
  • Western-Blot : méthode complexe de mise en évidence des anticorps. C’est le test qui détient, la plus grande sensibilité, spécificité et réagissant le plus précocement (4s après la contamination). Il est très couteux et ne peut pas être réalisé en routine.
  • ELISA : plusieurs kit sont commercialisés mais leurs performances sont variables.